Sticky Fingers : les Rolling Stones, Andy Warhol et la braguette magique

 Il y a 50 ans, les Rolling Stones s’associaient avec Andy Warhol pour créer une des plus célèbres pochettes de l’histoire du rock.

 

 

En mars 1971, une poignée de privilégiés et quelques membres de la presse reçoivent une invitation au concert privé des Rolling Stones au Marquee Club de Londres. Dans un coin du carton figure une bouche lippue tirant une langue rouge sang. Le nouveau logo du groupe (et sans doute le plus identifiable de l'histoire du rock) a été imaginé par le graphiste John Pasche, d’après les représentations de Kali, la déesse indienne de la destruction.

Quelques semaines plus tard, c’est au tour du grand public de découvrir le nouveau logo des Rolling Stones au verso de la plus célèbre pochette de leur discographie : celle de Sticky Fingers, conçue par Andy Warhol en personne. Le Pape du pop-art signe une œuvre visuelle hautement suggestive, illustrée par un entrejambe masculin circonscrit dans un jean ultra-moulant. Depuis près de 50 ans, l’identité du propriétaire anonyme de cette paire de Levis alimente toutes les rumeurs : s’agit-il de Mick Jagger ? De l’acteur Joe Dallensandro, un habitué de la Factory, de l’artiste Corey Tippin ou encore de Jed Johnson, alors compagnon de Warhol ? 

Photographié et designé par les acolytes Warholiens Billy Name et Craig Braun, l’artwork de Sticky Fingers n’aurait sans doute pas décroché le statut de pochette culte sans sa fameuse braguette magique : sur la devanture du 33-tours, une authentique fermeture-éclair métallique accompagne le fameux entrecuisse. Autant marquant qu’astucieux, ce coup marketing pose néanmoins un problème pratique : lors de l’emballage et de l’expédition des vinyles, de nombreux exemplaires sont endommagés par le frottement de la braguette. Une première solution de repli est trouvée en ouvrant légèrement le zip, qui révèle ainsi un fragment de son contenu interdit : un gros plan du slip du modèle inconnu, siglé par la signature d’Andy Warhol. 

À l’époque, les fans espagnols des Rolling Stones n’ont toutefois pas eu la chance de goûter au concept Warholien de Sticky Fingers. Alerté par les allusions toxicomanes du titre “Sister Morphine“, le comité de censure de l’état, alors dirigé d’une main de fer par le Général Franco, bannit la pochette originale et la remplace par une allégorie gore de son titre : des doigts poisseux émergeant d’une boîte de conserve ensanglantée.

Dès sa parution en avril 1971, Sticky Fingers et sa pochette emblématique marquent les esprits avec leur sulfureux cocktail de sexe, de drogues, de violence et de rock’n’roll !